mardi 26 février 2013

Santa Marta, Parc Tayrona - Sierra Nevada : Juan Carlos


Parc TAYRONA - Sierra NEVADA



Le Parc Tayrona : une côte de rêve avec des criques à faire rêver les catalogues de voyage, des villages Éco-touristes authentiques a souhait, tout plein de beaux et gentils touristes européens, nord américains, japonais et sud américains bronzés, bref tout y est plus beau qu'une carte postale. Nous y étions partis avec notre modeste tente pour trois ou quatre jours mais dès le premier nous sentimes que nous allions nous y ennuyer, nous quittames le paradis dès le lendemain. Bye, bye ! Ah si ! dans la lagune proche du camping il y avait un crocodile tout ce qu'il y a de plus coopérant pour l'office de tourisme et les appareils photos : matin comme soir il restait là, entre deux eaux, très croco comme il faut.

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LA SIERRA NEVADA, LA FINCA DE JUAN CARLOS, LOS PINOS


Non, non, lecteur avide de sensations fortes, nous ne sommes pas allés sans la sierra Nevada pour nous perdre dans sa jungle ni vaincre des sommets mais pour y rencontrer quelqu'un : Juan Carlos, cousin et ami de Juan, tout petit producteur de café et homme rare.

Pour rencontrer Juan Carlos nous sommes montés jusqu'a un hameau a deux heures de marche au-dessus du village de Minca, Campano. De là, encore une bonne demie-heure et l'on trouve, isolé sur une crête, le petit hotel Los Pinos avec vue immense sur les montagnes, les vallées, Santa Marta au loin, l'océan sur tout l'horizon.  Los Pinos est tenu par un jeune anglais, Edward, qui est aussi l'ami de Juan Carlos : ils partagent tout deux la meme passion pour des manières de vivre proches de la Pachamama. L'hotel est très rudimentaire mais rien n'y manque, en tout cas ni nourriture, ni eau, ni bonne ambiance. 

Pour rejoindre la finca de Juan Carlos il faut encore monter la piste puis le sentier pendant deux heures trente.


Nous y montons de bon matin. La finca  est  située a 1800 m dans la montagne, de l'autre coté de la vallée. Deux heures trente de marche avec l'étagement de végétations : forêt tropicale épaisse et multiples torrents, variation d'eco-systemes selon les expositions, très hautes fougères arborescentes, arbres aux fleurs orangées, lianes, bambous et mille autres espèces. Chants d'oiseaux, ils sont ici légions et de tres grandes variétés, stridulations d'insectes, oiseaux colibris qui plongent leur bec dans le calice des fleurs.


Un dernier sentier escarpé et voici Juan Carlos. Il brosse les grains de café qui sèchent au soleil. La plantation est sur un versant escarpé de la montagne. Une pierre dressée en annonce l'entrée. Une cuisine cabane, tout comme chez les indigènes, et une tente comme habitation  sont tout le confort de cet hermitage-caféier.


Juan Carlos est fils et petit-fils de révolutionnaires, son père est mort au combat dans la guerilla. Il était il y a peu encore ingénieur informatique a Boston, USA, ou il tentait de lutter contre le système capitaliste. Il a tout laissé pour venir s'installer dans cette finca récemment plantée en 2010. C'est sa troisième saison dans la montagne. 

- Je suis venu me sauver moi-meme avant de sauver le monde. Ma philosophie : vivre de mon travail sans alimenter le systeme. Maintenant, je sais qui je suis.


Il nous prépare le repas sur un feu de bois. Une economie du strict necessaire. Il vit tout juste de son café, les cours sont bas. Le plus difficile ? la saison des pluies, il pleut tous les jours d'avril a mai.


Une belle rencontre d'un homme encore jeune qui va jusqu'au bout de lui-meme, devient paysan pour se trouver.


Nous sommes restes dans la sierra du jeudi 21 au lundi 25 fevrier. Peu de photos, la carte en contenant le plus grand nombre a été égarée à Carthagène.
Quelques photos du parc Tayrona





 la Sierra Nevada aux abords de la finca de Juan Carlos

















LA GUAJIRA ou pourquoi nous reviendrons en 2015


Du vendredi 15 février au mardi 19
Juan et Janeth nous ont mis en contact avec Javier, un ami qui vit a Santa Marta, une petite ville portuaire sur le Pacifique, au nord de Carthagene et de Baranquilla. Javier a pour amis des Wayuus d'une communaute indigene de la Guajira. Le projet est que nous puissions passer quelques jours dans la rancheria de la communauté.
Cher et hypothetique lecteur autant te prévenir tout de suite, cet article est long. Nous avons fait le choix de te parler de gens, d'une communauté, qui nous ont beaucoup donné en peu de jours. Il contient aussi plus de photos qu'habituellement. Il commence aussi par quelques noms qui ne te sont peut-être pas communs :
Santa Marta - De cette petite ville il y a peu a dire si ce n'est qu'elle est la porte de nombreux sites très touristiques de la cote Caraibe, tels le Parc naturel Tayrona et la sierra Nevada sur lesquels nous reviendrons dans un tout prochain article.
Un hotel de bonne qualité pour un prix plus que modique : la Casa Familiar, calle 10  n2. Propre, aéré, disposant d'une cuisine, prix une chambre pour deux avec sdb 40 000 pesos. Frequenté essentiellement par de jeunes voyageurs et ouvriers de passage. Deux restos que nous recommandons, l'un pour une cuisine copieuse, bonne et a prix modiques - il est situé juste en face de l'hotel - l'autre pour sa cuisine de qualité, fine et délicate, a prix tout a fait abordables - le Marisol, calle 19 n 3. Tout deux font une cuisine de poissons et camarones.
La Guajira - Le territoire le plus au nord de la Colombie. C'est une vaste presqu'ile, semi-désertique dans sa premiere moitie, désertique dans la seconde. En frontiere a l'est avec le Venezuela ce qui a permis de developper une activite presque legale, en tous cas abondante... la contrebande, en particulier d’essence.  La capitale de la région : Riohacha, ville de 180 000 habitants et sur la côte.
Les Wayuus - Peuple indigéne originaire de l'Amazonie venezuelienne. Ils ont opposé une resistance farouche aux Espagnols, ont été – c’est dans la logique des choses - largement décimé, se sont refugiés dans les parties les plus inhospitalières de la Guajira. Leur langue : le Wayuu. Ils vivent en petites communautés familiales ou clans, dans des rancherías (hameaux), de la pêche en mer et en lagune (crevettes) pour ceux sur la coôte, de la recolte de sel de terre pour ceux a l'interieur du desert. Ce sont aussi eux qui confectionnent ces superbes sacs en laine tissée et aux couleurs et motifs éclatants : les mochilas. Farouches avec les gringos comme avec les autres Colombiens, ils tiennent a leur langue, leur culture, leurs valeurs et modes de vie, bref à leur identité. Enfin, point très important nous le verrons par la suite, leur société est matriarcale.
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Et maintenant, lecteur qui en attendm plus, reprenons le fil de notre séjour.
Ce qui n’était encore qu’un souhait prend forme et se réalise apres quelques coups de fil et emails. Javier est un homme d'action et d'entreprise, à peine arrivés a Santa Marta nous sommes mis en contact avec Clareña.
Clareña  vit avec toute sa famille étendue (mari, enfants, parents, soeurs et freres, belles-soeurs et beaux-freres,...) dans la rancheria Cachaca 3, a 10 km sur la cote au sud de Riohacha. Les indiens sont plutot de petite taille et de peau tres mate, le cheveu absolument noir, elle ne déroge pas a la règle. Elle a un sourire eclatant qui laisse largement voir une dentition de grand carnassier (alors qu'ici on ne mange presque jamais de viande), des yeux noirs pétillants d'intelligence. Clareña est allée jusqu'en terminale, ce qui est peu commun, elle comprend un peu l'anglais, sait parfaitement lire et écrire, elle est par conséquent  celle qui formule et négocie dans les relations avec les différentes administrations. Un mari, Cesar, et cinq enfants de 3 a 13 ans, Alessander, le plus jeune, Jordana et Nanci, les deux filles, Christian et Alan, les deux aînés. Son papa est le cacique de la rancheria, une sorte de maire très respecté, même si ce titre est plutot decoratif... Ca ne t’a pas échappé, lecteur attentif, le veritable pouvoir c'est celui de sa femme : lui parle, elle decide.
 
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 Notre bus venant de Santa Marta s'arrête sur la nationale qui file tout droit vers Riohacha, en pleine désolation de végétation pauvre et épineuse. Motif de l'arrêt : Clareña agite un tee-shirt aux couleurs du drapeau colombien, bout de tissus fixé au bout d'un râteau. C'est le signal convenu avec le chauffeur du bus afin qu'il sache où nous déposer dans ce paysage uniformement sableux et désseché. Clareña est accompagnée de Cesar et de la plus grande des deux filles, Nanci, 8 ans. Accolades joyeuses, puis nous prenons la petite piste qui mène a la ranchería.
Vingt minutes après nous y voici : un tres vaste cercle sableux gagné sur la maigre végétation, avec tout de même quelques petits arbres pour sauvegarder des endroits d'ombre.  Une petite dizaine d'habitations, ou cabanes, espacées et avec chacunes la cocina (cuisine) : un cabane plus rudimentaire separée seulement de quelques mètres de celle qui sert d'habitation à l'ensemble de la famille restreinte. La famille vit dans une seule piece de 12 m2, chacun des membres dispose d'un hamac pour dormir. Nous retrouvons ici l'habitat traditionnel propre à nombre de peuples et communautés indigenes, tels les Quechuas de Bolivie et du Perou ou encore les Tarahumaras, Mayas et Huicholes du Mexique. Une école, une seule clase pour les 20 jeunes enfants scolarisés, pour les plus grands le college et le lycee sont a Riohacha); une vaste case communautaire ou se tiennent les assemblées du village et où sont recus les visiteurs d'autres communautés indigènes; une citerne de 9 m3 d'eau potable; cinq ou six petits enclos pour les chèvres et les brebis lesquelles mènent dans la journée leur vie en toute liberté avec cochons noirs, poules et coqs, chiens chats et raton laveur. Tout ceci forme un espace parfaitement identifié, ouvert et de circulation entre les maisons familiales et en proximitéavec la grande lagune et l’océan.
De quoi vit-on à la Cachaca 3 ? Essentiellement de la pêche, pêche aux poissons dans l'océan, pêche aux crevettes dans la lagune. Chaque nuit, vers 3 ou 4 h du matin, les hommes les plus jeunes partent sur de petites barques, certaines avec un moteur plus que rudimentaire,toutes avec une petite voile carrée ainsi qu'une pagaie. Ils reviennent vers les neuf heures. Pêche au filet qui ne ramène guère plus d'une vingtaine de poissons de petites tailles, lesquels sont immediatement répartis entre trois ou quatre familles par une femme, souvent Clareña. Quand la mer est trop forte, ce qui arrive assez regulierement, on ne part pas. Nous sommes dans une economie d’ auto-subsistance. Ce qui se vend : parfois les crevettes lorsque la pêche a été fructueuse mais surtout  les mochilas, ces magnifiques sacs de laine, que des femmes vendent a Riohacha ainsi qu’aux commercants de toute la côte Pacifique et bien au-delà. Pour les reste: essentiellement du riz, des pâtes, des bananes et quelques légumes (courges, par exemple), tout est importë. Du tourisme ? Ici, aucun. Il n'y a nulle infrastructure pour le recevoir, le paysage y est trop desole, les plages peux propices a la baignade et de toute manière les Wayuus sont bien trop préoccupés de préserver leur identité.
 
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 Deux arbres auxquels sont accrochés deux hamacs seront notre maison. Le jour, il fait très chaud, même lorsque le vent soufflé ce qui est fréquent; la nuit, entre 3 et 5h, il fait frisquet. Les hamacs se balancent sous le vent, le ciel est incroyablement constellé d'étoiles, la lune baigne la rancheria d'une douce lumiere.
Si peu de choses, si peu de biens. Quelques cellulaires, une télé pour certains et toutes avec des captations plus qu'improbables. La veille du jour ou nous sommes partis, le lundi, le générateur a rendu l'âme. C'est lui qui fournit l'ensemble de la rancheria en électricité; il est fourni par la ville de Riohacha dont la communauté dépend. Tirer une ligne électrique sur les 10 km séparant le village de la ville serait évidemment la solution, d'autant que d'autres rancherias sont à proximité, mais cela aurait pour consequence d’installer du durable, ce qui est inenvisageable pour les autorités gouvernementales, qu'elles soient de la capitale ou de la région. Nous y reviendrons dans notre partie L’intolerable et la colère...
Ici pas de gestes de violence, que ce soit a l'encontre d'un adulte ou d'un enfant. Jamais non plus un mot plus haut qu'un autre. Non pas que nous soyons en présence d'anges ou d'êtres parfaits mais simplement parce-que la recherche de l'équilibre dans les relations est une necessité pour la survie. Le dimanche en fin d'apres-midi, les hommes se donnent au footbal. Le jeu est vif, âpre, jamais violent, la moindre faute jamais contestée. Ce même dimanche, nous sommes restés toute la journee sous nos deux arbres en compagnie de Clareña, de ses parents et de Cesar. Cesar nous fabrique une gourde-calebasse, le papa en realise le filet pour la porter à l'epaule, la maman tisse une mochila, Clarena assure le ravitaillement en eau, café, repas du midi; les enfants circulent, jouent avec nous, repartent s'occuper des brebis et des chèvres, c'est de leur responsabilité quotidienne. Nous devisons tranquillement, la parole circule sans heurt, le papa raconte des histoires, le temps s'écoule doucement; aucune envie aucun besoin d'être ailleurs que là ou nous sommes maintenant;  demain lundi les travaux  quotidiens attendent chacun.
Ici aussi le chamanisme existe. De lui, Clareña et celles et ceux avec qui nous avons parlé nous diront peu, hormis qu'il emprunte plusieurs formes, celles pour les soins, pour les rituels, les divinations,... Pas de pratique religieuse visible, le catholicisme semble pour le moins accessoire.” Il y a un dieu un seul”, nous dit Clareña, mais de lui ou d'elle nous n'en saurons pas plus, hormis que terre et pluie sont sacrées. Car la pluie tombe, en mars et abril, abondamment chaque jour, transformant pour deux ou trois mois le désert en vaste lagune mais ne permettant pas à la végétation d’en profiter vraiment : le sol est trop pauvre.
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 Encore ce dimanche soir. Nous sommes assis près de la cocina. “ Je vais vous raconter une histoire, nous dit Clarena, et c'est aussi un mythe”. C'est arrivé â mon papa dans un songe. C'est l'histoire de la Sirena (sirene).
C'etait la nuit, mon papa etait près de la lagune. Il revenait vers la rancheria et, derrière lui, il a entendu qu'on l'appelait, une voix de femme. Il se retourne et il voit une femme habillée d'une grande et belle robe blanche qui lui descend jusqu'aux pieds, une robe scintillant. C'était la Sirena. Elle enlève sa robe et mon papa voit qu'elle a des jambes et deux pieds, tout comme une femme. Puis elle remet sa robe. Elle voulait que mon papa soit son amoureux. Alors, sur la lagune, mon papa a vu aussi une très grande maison avec dix, vingt, plus de trente pièces, une maison pleine de gens, des gens qui ne le voyaient pas. Mon papa savait que c'etait la maison de la Sirena, il n'a pas voulu y entrer, il a repris son chemin. Mais la Sirena le suivait et quand il est arrivé au village, elle était toujours là. Mon papa la voyait mais les autres du village ne la voyaient pas. Au bout d'un long moment, la Sirena a disparu. Quand mon papa est revenu a la lagune, la grande maison aussi avait disparu. C'etait un songe mais les Sirenas existent réellement, j'y crois.
Encore une autre histoire :
Une fois, dans un village pas loin d'ici, une Sirena a choisi un jeune homme pour amoureux. Elle venait de la mer, pas de la lagune. Il y a aussi des Sirenas des rios, des torrents de la montagne et de la forêt. Le jeune homme est tombé amoureux, il l'a emmené dans sa maison, dans le village. Il a bouché la fenêtre de la maison, il a aussi réduit la porte pour que les autres du village ne puisse la voir. Très vite, il a eu tout ce qu'il voulait : beaucoup de poissons quand il partait pêcher, beaucoup de bonne nourriture, de brebis, de chèvres. Evidemment, les gens du village étaient tres intrigués, ils voulaient voir ce que le jeune homme cachait dans sa maison. Puisqu'ils ne pouvaient voir par la fenêtre obturée, par la porte réduite, ils ont percé un trou dans un mur. A l'instant même ou ils regardèrent par le trou, La Sirena disparut et avec elle toutes les richesses. Quelques temps après, le jeune homme est mort. C'est une histoire vraie."
Aujourdhui, alors que je tente de corriger les fautes de frappe de ce texte, nous sommes à Carthagène, au festival international de cinéma. Ce matin nous avons vu un admirable documentaire long métrage, il avait pour sujet l’initiatiation d’une très jeune adolescente pour la préparer à ses premières menstrues et à devenir femme. Nous avons vu tres exactement le mythe de la Sirena vécu dans un long rituel (plusieurs mois) pendant lequel la jeune fille, initiée par sa mère, sa grand-mère, d’autres femmes de la communauté, reste enfermée dans une cabane construite spécialement pour elle par les hommes. Là encore aucune violence, le rituel est parfaitement accepté par celle qui va devenir femme, ewlle est quotidiennement accompagnée, recoit des soins particuliers, entend les mythes et valeurs des femmes Wayuus. A la fin de l’initiation, elle choisit si elle veut être ou non mariée oupromise à un homme dont le père promet la dote. Elle refusera pour pouvoir continuer au lycée ses études. Ce documentaire est d’une force et d’un enseignement bouleversants sur très grande richesse de la culture Wayuu. Son titre : La eternal noche de las doce lunas (L’éternelle nuit des douze lunes). Amis francais, chance immense : il sera projeté en présence de la réalisatrice le 12 mars prochain au festival latino-américain de Toulouse !    
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Ana Akua ipa, wanawaa, llotoo akua'ipa, wayuuira ayatawaa, sumaiwamaajatu wayuu mule'u  sulu unukua'ipa. akua'ipa, tuu taashiika, kajata akua'ipa.
Le bien de tous est une vision pour faire un futur meilleur, de génération en génération notre savoir. Partager, respecter, donner à connaître sur nos manières de vivre, continuellement, aussi sur les valeurs de notre culture présente comme celle du passé.
Le Wayaunaki est la seconde langue officielle de l'Etat de Zulia eu Venezuela et du departement de la Guajira en Colombie.
 
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Lundi fin de matinée  veille de notre depart, avec Clareña et sa famille nous partons pour Riohacha. Objectifs de la journée : la visite du Centre culturel et de son expo sur les Wayuus, manger une glace au supermarkett Carrefour (ben oui, ami lecteur, ici aussi Carrefour existe et il a été racheté par une grande banque chilienne).
Lèche- vitrine, les enfants s'extasient devant les bijoux et les chaussures pour femmes decorées de perles de couleur, Cesar devant les sonos (ah, diffuser le plus fort possible a partir de la maison des musiques et chants colombiens !) et les outils (Cesar est un excellent bricoleur frustré de n'avoir que très peu d'outils usagés), Clarina devant les imprimantes (on lui a donné un vieil ordi avec lequel elle peut consulter internet, taper les documents administratifs, et elle économise pour acheter de quoi imprimer), tous devant les réfrigerateurs, le rêve impossible bien au-dessus des moyens financiers. Enfin, poulet frites et glaces tant attendus.
Le Centre culturel est une énorme structure moderne situé a l'extremité sud de la plage. Enorme et presque vide. Ca nous rappelle ceux de Santiago et de Valparaiso au Chili : on fait des grands batiments dans lesquels il n'y a pas de fonctionnement (ca doit sans doute rapporter pas mal d'argent aux decideurs et aux entreprises du batiment...).
Deux très grandes salles pour l'expo. L'une, en plein aménagement, doit recevoir des panneaux textes et photos sur les recherches ethnologiques menées dans les années trente (un scientifique francais - Paul Ribet - a conduit des recherches financees par le gouvernement de Leon Blum). L'autre expose des objets et textes sur la culture Wayuu, la pêche, le matriarcat, les coutumes et manières de vivre (reconstitution d'une cocina avec exactement les memes objets que ceux de la cocina de Clariña ou de sa maman ou de toute femme de la rancheria...). Une partie culture et éducation montre de jolis enfants dans une jolie classe avec de jolies fournitures, beaux livres, gentil maitre... Parfait mensonge : qu'il fait bon et doux de vivre chez ces gentils indigènes qui, grâce a Riohacha et la région, et sans doute aussi grâce au vrai Dieu et aux Espagnols qui l’ont si gracieusement importé, disposent de tout et ne manquent de rien (violente envie de tout casser…). Dans une seconde partie, maquettes et trucs-muches alternatifs sur l'exploitation petroliere et de gaz sur la côte la plus au nord de l'Atlantique, avec deux immenses plateformes.
C'est cette seconde partie de l'expo - gloire a la technologie colombienne - que nous commente la directrice du Centre mais sur la premiere... nada. Heureusement que Clareña est la, heureuse et fière qu'une expo soit faite sur leurs communautes et ce malgré l'indigence des infos données (bon, on casse pas…).
Rien, absolument rien sur l'extrême pauvreté des communautés wayuus, sur leur relegation dans les territoires où rien ne pousse, où vivre est une gageure.
Rien sur le déversement par la ville de Riohacha de ses eaux usées dans une grande lagune, avec disparition de la faune et de la flore.
Rien sur l'absence d'équipements durables en eau potable et électricité (alors que la Bolivie vient d'en terminer les équipements pour toutes les communautés et villages des hauts plateaux andins ainsi que pour la région de Vera Cruz).
Rien sur l'absence totale de gestion des ordures. Pour celles décomposable  les indigenes savent comment faire, mais pour ce qui est des sacs platiques si abondants dans toute l'Amerique du sud et centrale, ils entourent en un vaste cercle la rancheria.
Rien sur ces écoles vides de tout materiel pédagogique, seuls des chaises a plateau inclinable pour tout espace de travail individuel et collectif, y compris pour le maitre, et un tableau blanc avec quelques feutres desséchés. Lequel maitre est recruté et remuneré par la ville de Riohacha pour exercer 4 heures par jour - oui attentif lecteur, tu as bien lu : 4 heures par jour ! - et pour exercer un metier sur lequel il a tres peu de formation et fort peu de motivation.
Mais par contre, oui, d'affreuses statues monumentales sur les avenues qui bordent  les plages de Riohacha, Santa Marta et autres villes de la côte, toutes du même salopard de sculpteur (pardon d'utiliser ce mot de sculpteur pour ceux qui en exercent véritablement l'art), statues d'une femme et d'un homme indigène aux corps monstrueusement musclés - representations fascistes - aux visages exprimant une niaiserie ignoble. Oui, on vend un peu partout de l'indigène, de la fausse culture indigène, pubs et offices ou agences de voyage, parce que c'est bon pour le tourisme. Et le touriste, hélas, en raffole.
C'est quoi tout ca ? Du racisme et de la discrimination, tout simplement. A dégueuler. Politiques et décideurs, grands patrons, leaders representants des indigènes pratiquent la corruption et les detournements de fonds publics à grande échelle - la corruption comme mode de gouvernance - sans qu'aucun controle, aucune transparence ne puissent s'exercer. Heureusement que les démocraties européennes (pour ne parler que d'elles) montrent l'exemple d'une grande integrité, telle l'Espagne et les récentes révélations sur les detournements à grande echelle touchant même la famille royale, ou bien encore les detournements de biens  publics exercé par des politiques francais. Criminalité économique  et financière ont quelques beaux jours devant elle.
 C'etait notre partie Indignités et colère....
 
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Mardi 19 fevrier, nous quittons la rencheria, Clareña, Cesar, les enfants, les parents, les soeurs et frères, d'autres jeunes encore. Un dernier café et nous voici partis vers le terminal de bus de Riohacha.
L'experience vécue au cours de ces cinq jours est forte, prenante. Un vague projet commence a se dessiner, nous en parlons pendant le trajet du bus, puis avec Javier que nous retrouvons a Santa Marta : aider l'ecole de la rancheria a s'equiper ? Beaucoup trop tôt pour t'en parler ici dans ce blog, cher lecteur : tout est à étudier, réflechir pour construire avec d'autres en Colombie et en France... Gageons seulement que nous t'en reparlerons dans quelques temps.




 
Clareña

 
Cesar

 
Le papa et une soeur











 
notre chambre





 
la maman et Clareña


 
la cuisine

 
l'habitation de la famille


 
la danse de la jeune initiée

 

jeudi 14 février 2013

MEDELLIN coups de coeur - Luis Caballero; la nouvelle bibliothèque

Aujourd'hui nous sommes à Santa Marta, sur la côte Atlantique, il fait très chaud, très beau mais ce n'est ni de cette petite ville portuaire ni de la région des Caraïbes dont nous allons te parler, amie lectrice ou ami tout autant lecteur, mais de la nouvelle bibliothèque et, en premier, d'une expo au musèe d'art moderne de Medellin que nous avons vue il y a de cela plus de deux semaines :

Deseo y tormento (Désir et tourment), oeuvres de Luis Caballero


Dans un musée qui fut un très vaste entrepôt industriel situé au sud du centre de la ville et à proximité du rio, musée qui ne présente que des expos temporaires de très grande qualité, les toiles et dessins de Caballero sont un choc, une expérience au sens plein du terme : chacune des oeuvres bouleverse et force (ce verbe n'est pas trop fort) le regard et la conscience de celle ou celui qui s'y confronte à percevoir et se connaître autrement. Annie Lebrun, la poétesse et philosophe francaise, mais aussi Georges Bataille et, plus loin, Sade et Saint Jean de la Croix pourraient ici être convoqués.

Caballero est né à Bogota en 1943, il y est mort du sida en 1995, il avait à peine plus de cinquante ans. De toute sa vie il n'a cessé de peindre et surtout des corps, corps humains, corps d'hommes. L'exposition présente des oeuvres de la période 1968 à 1992, les dernières, celles du combat du peintre avec son désir mais aussi avec sa maladie et celle de ses amants. Toutes sont profondément sensuelles et érotiques, baucoup sont aussi d'une souffrance et d'une exaltation qui touche au sacré. Pour mieux connaitre son oeuvre tu peux, ami lecteur, taper Luis Caballero sur google et te ballader dans les nombreux sites qui lui sont concern´s.

Voici quelques photos prises lors de notre visite :

















 

La nouvelle bibliothèque


Toute autre est évidemment la nouvelle bibibliothèque, située elle dans un quartier périphérique du nord de la ville, tout en haut du métro téléphérique que l'on peut poursuivre au-delà de la crête de la montagne, au-dessus du grand plateau forestier qui domine Medellin.

Le quartier et ceux qui l'entourent est très populaire, beaucoup ici aussi comme à la Amenia de déplacés - afro-colombiens. indigènes, ex petits paysans - avec une réputation de violence sociale (et politique). La bibliothèque est entièrement concue, tant dans son architecture que dans son fonctionnement, pour réhabiliter l'image que le quartier a de lui-même mais aussi celle que les habitants de Medellin ont de ces quartiers pauvres.

Pour visiter, il suffit de le demander à l'accueil, une animatrice vous accompagne dans l'ensemble des départements du lieu. L'accès aux services de la bibliothèque est entièrement gratuit  pour les habitants des quartiers concernés; de nombreux micro-projets culturels s'y organisent, en lien avec les associations et établissements scolaires ainsi qu'avec le grand centre social qui la jouxte.